L’orfèvrerie

Devenir maître orfèvre

Sous l’Ancien Régime, l’exercice de la profession de maître orfèvre nécessite trois étapes obligatoires : l’apprentissage, le compagnonnage et la maîtrise.

Le cursus d’apprentissage démarre généralement vers l’âge de 14 ans chez un maître établi. Vient ensuite le temps du compagnonnage qui s’échelonne sur au moins deux années. L’apprenti orfèvre perfectionne sa technique auprès de son patron tout en préparant son examen de maîtrise qui comporte une partie technique et une partie théorique.

La période de compagnonnage achevée, l’ouvrier doit être jugé apte à devenir maître à son tour. Un acte appelé "de cancellation" passé devant notaire lui apporte la reconnaissance professionnelle.

La maîtrise constitue la dernière étape obligatoire pour devenir maître orfèvre. Le dossier de candidature du postulant doit comporter un extrait de l’acte de cancellation ainsi qu’un certificat de catholicité, les protestants étant exclus de ce métier d’art.

Lors de l’examen de maîtrise, le candidat doit exécuter une œuvre d’art imposée, appelée chef-d’œuvre et subir un examen oral. Une fois admis, il doit verser une caution très importante de 1 000 livres, prêter serment et présenter son poinçon qui est insculpé, c’est-à-dire gravé sur une table de cuivre conservée à l’hôtel des Monnaies. Chaque orfèvre détient en effet un double poinçon qui lui est propre et qui lui sert de garantie à l’égard de ses clients. Il les appose sur chacune de ses œuvres afin d’en garantir leur authenticité et éviter toute contestation.

Les réalisations d’orfèvrerie

Parmi les principaux clients des orfèvres, on trouve les ordres religieux avec les accessoires liturgiques, tels calices, reliquaires, croix ou encore flambeaux, mais aussi des aristocrates.

De nombreux grands bourgeois font également appel aux orfèvres comme les industriels, notaires, magistrats et huissiers pour la réalisation de bijoux, vaisselle et autres mobiliers d’apparat.

L’atelier de l’orfèvre

L’atelier du maître orfèvre est nécessairement spacieux. Un établi permet d’entreposer les outils pour la taille des pierres et des métaux. On retrouve les forges dans une grande pièce pour que le maître orfèvre prépare ses alliages d’or, d’argent et de cuivre. Cette pièce est obligatoirement soumise à serment et autorisée par la Cour des monnaies. La réalisation de l’œuvre commence par un dessin de l’objet et de ses ornements. Puis le maître orfèvre façonne les moules dans lesquels il verse l’alliage. Le travail demande force et habileté pour transformer le lingot en feuilles par martelage sur une enclume. On retrouve en plus de l’or et de l’argent, d’autres matériaux nobles comme l’émail, l’ivoire, ou les pierres précieuses. Une fois la pièce polie et ciselée, il y frappe ses poinçons.

La jurande

La profession d’orfèvres est très règlementée de par la valeur des objets manipulés. La jurande ou corps de métier permet ainsi, sous l'Ancien Régime, d’observer les règlements établis pour la profession. La jurande permet également de régler les éventuels litiges. Les inspecteurs montpelliérains sillonnent ainsi la province pour débusquer les fraudes. Les jurés-gardes sont les dirigeants garantissant l’intégrité de la profession.

Les jurandes, maîtrises et corporations sont interdites à la Révolution. Les poinçons nationaux remplacent les poinçons de jurande à partir de 1798.

Le parcours du maître orfèvre alésien, Augustin BASTIDE (Antoine-Marie-de-la-Conception)

Fils d’un bourgeois alésien né à Madrid le 11 septembre 1763, Augustin Bastide est mis en apprentissage par son père en 1779 pour 8 ans chez Pierre Bonamy, maître orfèvre d’Alès [à noter : Pierre Bonamy aurait un lien de parenté avec Antoine Bonamy figurant sur la plaque d’insculpation (poinçon losangique illisible) sous le numéro 30]. Le contrat d’apprentissage d’Augustin Bastide est enregistré à la Monnaie de Montpellier le 28 juin 1779 et cancellé le 1er octobre 1788.

Nous conservons trace du brevet d’apprentissage en date du 13 mars 1779, passé chez Joseph Jean Paul Crozade, notaire d’Alès et de l’acte de cancellation en date du 1er octobre 1788, passé chez Claude Joseph François Crozade, notaire d’Alès. Ces deux actes notariés sont conservés dans les archives privées d’Augustin Bastide sous la référence 1 J 109.

Le maître orfèvre Feljas d’Alès rédige le 2 octobre 1788, un certificat précisant qu’il a reçu Augustin Bastide en qualité de compagnon orfèvre durant une année et demie. Ce document est également conservé sous la référence 1 J 109.

Augustin Bastide est reçu maître orfèvre à Montpellier en 1788 après avoir fait son chef d’œuvre devant la jurande de Montpellier. Il prête alors serment, verse sa caution et insculpe ses deux poinçons A et B, visibles ci-contre.

Il est nommé juré-garde en juin 1790 et fait insculper à Montpellier les poinçons de communauté. Nous trouvons trace de cette nomination dans le registre des maîtres orfèvres d’Alès, conservé aux Archives départementales du Gard sous la référence 4 E 307.

On retrouve également le nom d’Augustin Bastide dans un tableau répertoriant les fabricants d’or et d’argent établis à Alès à la date du 1er novembre 1811, conservé sous la référence 4 P 3. Il a pour emblème une petite rose. On trouve aussi sur ce tableau le fils de son maître d’apprentissage, Jean Bonamy.

Brevet d’apprentissage d’Augustin Bastide en date du 13 mars 1779, passé chez Joseph Jean Paul Crozade, notaire d’Alès (1779).

Acte de cancellation d’Augustin Bastide en date du 1er octobre 1788, passé chez Claude Joseph François Crozade, notaire d’Alès (1788).

Certificat de compagnonnage établi par le maître orfèvre Feljas d’Alès qui a pris en apprentissage Augustin Bastide sur une année et demie (2 octobre 1788).

Nomination d’Augustin Bastide juré-garde à la jurande d’Alès (30 juin 1790).

Tableau recensant les fabricants d’ouvrage d’or et d’argent établis à Alès à la date du 1er novembre 1811 sur lequel figure Augustin Bastide (13 novembre 1811).

Papiers à en-tête d’orfèvres (1892, 1966).