L'Algérie, seule colonie française de peuplement, avec un million d'Européens en 1954 assure à la France une place très importante parmi toutes les nations disposant de colonies dans le monde.
Or, l'insatisfaction de la population musulmane, forte de neuf millions d’habitants et réduite à l’état de misère par la crise agraire, est grandissante. Le statut de 1947 instaure une assemblée algérienne élue selon un mode de scrutin très inégalitaire (double collège), lésant la majorité musulmane et alimentant encore les tensions jusqu’à l’éclatement d’une insurrection armée, déclenchée à la Toussaint 1954 par le Front de libération nationale (FLN). Le territoire algérien est en effet secoué par une trentaine d'attaques simultanées contre des objectifs militaires ou de police qui font sept morts. Face à ces attaques, la France réplique et François Mitterrand, alors ministre de l'Intérieur, décide d’envoyer trois compagnies de CRS. La lutte armée se généralise à compter du 12 mars 1956 quand l’Assemblée nationale vote les pouvoirs spéciaux au gouvernement Guy Mollet. C’est ainsi que 450 000 soldats français du contingent sont alors mobilisés et envoyés sur place.
Bien que la guerre d’Algérie se déroule dans un premier temps sur le sol algérien, le conflit s’implante rapidement en métropole notamment par l’infiltration du Front de libération nationale en France.
L’influence du FLN dans le Gard s’observe notamment lors de la grève de janvier-février 1957, massivement suivie à plus de 90 % par les travailleurs algériens du bassin minier. Une soixantaine d’entreprises gardoises emploient en effet des travailleurs algériens dans le bâtiment, l’agriculture et les mines, y compris dans le bassin houiller des Cévennes. La présence de travailleurs algériens dans le bassin cévenol remonte d’ailleurs à la Première Guerre mondiale pour compenser le manque de main d’œuvre lié au départ des hommes sur le front. Ces travailleurs algériens vont donc être rapidement fichés (fichier Z) et surveillés par les Renseignements généraux et ce dès 1957, en application de la circulaire n° 332 du 5 août 1957. Cette circulaire vise à créer un fichier national de tous les militants nationalistes jugés dangereux résidant en métropole, alimenté par le regroupement de tous les fichiers départementaux tenus par les Renseignements généraux, afin de lutter contre l’action subversive et permettre une réaction rapide en cas d’attaques terroristes.
Si la France finit par gagner la guerre en reprenant le contrôle dans les grandes villes et sur les frontières puis dans les campagnes algériennes, elle la perd auprès de l'opinion tant internationale que nationale, tandis que les exactions de l’armée française et du Front de libération nationale rendent toute cohabitation impossible.
Le Gouvernement se retrouve dans l’impasse et laisse de plus en plus l'initiative politique à l'armée jusqu’au putsch du 13 mai 1958, où une manifestation tourne à l’insurrection encadrée par des militaires français qui réclament le retour du Général de Gaulle. Revenu au pouvoir en mai 1958, grâce à la pression des militaires et des Français d'Algérie, de Gaulle laisse croire un temps qu'il va pacifier l'Algérie et la maintenir française. Mais face à la pression des membres du FLN, il fait entériner par référendum en 1961 une politique d'autodétermination qui admet la possibilité d'une "Algérie algérienne".
Après le putsch des généraux d'Alger de 1961, il engage avec le Front de libération nationale (FLN) des négociations qui aboutissent aux Accords d'Évian signés en 1962, mettant un terme au conflit et organisant l’indépendance de l’Algérie ratifiée par référendum le 1er juillet 1962.
Dans ce contexte, la France doit faire face à une arrivée massive à la fois des Français d’Algérie et des harkis en métropole. Dès l’été 1962, près de 700 000 rapatriés arrivent précipitamment en métropole dans des conditions dramatiques en laissant tout derrière eux ou presque. Les préfets forment dans l’urgence des comités départementaux d’accueil chargés de coordonner les actions de toutes les associations caritatives disponibles. On compte fin 1963, 17 000 rapatriés dans le Gard, 35 000 dans l’Hérault et près de 90 000 pour l’ensemble du Languedoc- Roussillon. Durant l’été à l’hiver 1962-1963, environ 20 000 harkis avec leur famille sont rapatriés en urgence en métropole par l’Armée et envoyés dans des Centres comme celui de Saint-Maurice-l’Ardoise qui voit arriver et repartir au cours des premiers mois 6 000 harkis.
Le Centre d’assignation à résidence surveillée de Saint-Maurice-l’Ardoise est créé le 17 avril 1958
[Didier Lavrut, "Saint-Maurice l’Ardoise : Un camp pour activiste dans le Gard en 1962", Revue d’histoire moderne et contemporaine de Nîmes et du Gard, 2007].
Il a accueilli trois catégories de population. Un millier d’Algériens d’abord (Front de libération nationale (FLN), Mouvement national algérien (MNA) et droits communs) avant leur évacuation en décembre 1961. Puis, près de 200 activistes ou sympathisants de l’Organisation de l’armée secrète (OAS) y seront enfermés de 12 janvier au 14 juillet 1962. Enfin, le camp est réhabilité pour accueillir plus de 6 000 harkis rapatriés avec leur famille à compter de septembre 1962. Une fois la phase de transit terminée, le Centre va accueillir à partir du début de l’année 1965, toutes les personnes ayant soit une inaptitude physique, soit un manque de ressource ou soit une incapacité de vivre en autonomie sans assistance sociale ou sanitaire.
Ainsi, le nombre de harkis au Centre de Saint-Maurice-l’Ardoise se stabilise autour de 800 personnes durant la décennie suivante. Sont regroupés dans le Centre, infirmes, blessés de guerre, personnes âgées, veuves ou encore malades souffrant de troubles physiques ou psychologiques. De la fin des années 1960 au milieu des années 1970, les installations du Centre se dégradent et deviennent insalubres. Les enfants ayant grandi dans le camp se retrouvent également coupés du monde du fait de l’isolement du Centre. Par ailleurs, le nombre de malades psychiatriques grandit ayant des répercussions considérables sur les enfants qui côtoient quotidiennement de nombreux malades. Ces facteurs cumulés déclenchent une crise menée par les jeunes durant l’été 1975 entrainant la fermeture définitive du camp.
Le bilan humain de cette guerre est encore très controversé aujourd’hui.
On parle de 300 000 à 400 000 morts du côté algérien. On compte par ailleurs 27 500 militaires français tués et un millier de disparus, et chez les civils européens 2 800 tués pour 800 disparus. En France, la guerre d'Algérie a laissé un véritable traumatisme notamment chez les Pieds-noirs, douloureusement déracinés et souvent mal accueillis à leur arrivée en métropole où ils ont dû reconstruire leurs vies. Les harkis, ces supplétifs algériens de l'armée française, massacrés par dizaines de milliers par les soldats de la nouvelle République algérienne, restent par ailleurs les témoins meurtris de cette guerre d'indépendance. Aujourd'hui, les liens entre l'Algérie et la France restent étroits, grâce aux accords commerciaux et à une coopération technique et culturelle.