Curiosités & Trésors (Septembre 2025)
Les Archives départementales conservent de précieux fonds iconographiques. On y retrouve des photographies, des cartes et plans, des affiches, des dessins, des gravures...
Selon le Dictionnaire de terminologie archivistique.doc (francearchives.gouv.fr) :
- les documents figurés (ou iconographiques) sont des "Documents composés essentiellement d'images fixes comportant un élément de dessin, de figuration graphique ou photographique."
- les documents photographiques sont des "Documents sur support photographique, incluant les diapositives, les négatifs, les épreuves, voire les documents s'y rapportant".
- les documents cartographiques concernent "les cartes et plans, quelle que soit leur échelle".
Au fur et à mesure des classements, des inventaires sont élaborés et rendus disponibles en ligne.
Tous les mois, les Archives départementales du Gard vous proposent de découvrir des documents originaux et uniques extraits de leurs fonds iconographiques. Les "Curiosités & Trésors" du mois vous sont présentés.
Septembre 2025
+ d'infos : Une eau-forte de Frans Hogenberg (Arch. dép. du Gard : 5 Fi 45)
Ce mois-ci, nous vous présentons une estampe originale particulièrement rare, conservée dans le fonds 5 Fi des Archives départementales du Gard. Attribuée à un graveur flamand, cette œuvre illustre un épisode marquant de notre histoire locale : la Michelade.
Ce document iconographique remarquable nous est parvenu dans un excellent état de conservation. Il a été produit par le talentueux Frans Hogenberg (1535-1590), à la fois dessinateur, graveur, cartographe et éditeur. L’originalité de son œuvre a notamment inspiré Pieter Bruegel l’Ancien, célèbre pour ses scènes populaires flamandes. Hogenberg appartenait à une famille de graveurs renommée, active en Europe du Nord et en France. Il réalisa notamment les gravures du premier atlas de vues de villes de la Renaissance, le Theatrum orbis terrarum, ou Théâtre des cités du Monde, ouvrage remarquable publié en 1570, traduit en plusieurs langues et réédité plus de trente fois !
Cette très belle épreuve — dont il existe une version en couleur (aquarellée à la main), conservée à la Bibliothèque nationale de Paris — reprend les codes iconographiques de l’atelier d’Hogenberg : on y retrouve, comme souvent, un cartouche en marge inférieure comportant des explications en allemand évoquant le contexte historique, accompagné, en-dessous, d’une mention de la date.
L’atelier d’Hogenberg, composé de nombreux élèves et assistants, proposait une production très diversifiée : scènes fantastiques, allégoriques, humoristiques, mais aussi des représentations de l’actualité, les fameuses Geschichtsblätter ou « feuilles d’histoire », souvent sensationnalistes et extrêmement populaires. Publiées à l’unité dès 1558, elles furent ensuite réunies pour former un exceptionnel recueil contenant au total 71 planches dont 34 planches documentent les guerres de Religion en France. C’est donc dans un ouvrage de grand format oblong, luxueusement relié, que fut présentée cette gravure de la Michelade, la cinquantième ; elle n’est pas signée puisqu’appartenant à un recueil. Notre exemplaire, imprimé plus tardivement s’en distingue légèrement : il ne porte pas le numéro 50 mais présente, sur l’épreuve, des lettres capitales de A à G renvoyant à une légende — aujourd’hui disparue — détaillant la scène.
Le rôle de la gravure au XVIe siècle dans la diffusion des événements d’actualité fut déterminant, d’autres graveurs de renom s’attachèreront encore à représenter la Michelade. Au milieu du XVIIIe siècle, dans son Histoire civile, ecclésiastique et littéraire de la ville de Nismes avec les preuves, l’historien Léon Ménard reproduit en frontispice du Livre XVI, une copie inspirée de l’estampe d’Hogenberg, réalisée par une artiste qui signe Anna Fonbonne. Il est d’ailleurs extrêmement rare de trouver une femme graveur à cette époque. Cette variation dans la représentation graphique de l’événement illustre à la fois la permanence d’un sujet historique et la vitalité d’un modèle artistique originel.
Nous étudierons, sous un angle historique cette fois, cette autre gravure dans notre prochaine publication.