La culture taurine dans le Gard
La « Fe di Biou » ou le goût, l’amour, la passion pour les taureaux de Camargue et tout ce qui s’y rattache, est une des caractéristiques du territoire gardois.
L’origine du taureau de race camarguaise
La présence de ce taureau a été relevée depuis l’époque préhistorique avec la découverte de crânes ornés de grandes cornes verticales en forme de lyre. Cette espèce peuplait donc déjà les forêts de la Gaule il y a de nombreux millénaires. Le taureau de Camargue descendrait d’un bœuf primitif sauvage vivant à l’époque glaciaire dans les bassins de la Saône et du Rhône. Cette espèce serait devenue mobile lors des changements climatiques de cette période ayant entraîné des bouleversements dans les conditions de vie de ces animaux.
La lente migration de cet animal l’aurait conduit à résider de manière définitive dans les marécages de Camargue. Peu à peu, l’homme a réussi à le capturer et à l’élever dans des manades spécialement conçues pour l’élevage des taureaux.
L’élevage des taureaux camarguais
Élevé dans les plus grands mas camarguais, le taureau noir de Camargue était d’abord destiné à la boucherie et aux travaux de labours au XVIIIème et au début du XIXème siècle. Toutefois, il représentait un réel danger pour les ouvriers agricoles qui parvenaient mal à le contenir. La domestication du taureau de Camargue n’a jamais abouti et les travaux agricoles étaient souvent de piètre qualité par le manque de maîtrise que les hommes exerçaient sur cet animal.
Il faut attendre le développement des courses de taureaux et l’essor des courses camarguaises dans la seconde moitié du XIXème siècle pour voir se développer l’élevage du taureau tel que nous le connaissons actuellement, avec la professionnalisation de l’éleveur devenu manadier, notamment dans les parties méridionales des départements du Gard et des Bouches-du-Rhône. De 1860 aux années d’avant-guerre, on ne dénombre pas moins de 3 000 taureaux de Camargue pour une dizaine de manades sur ce territoire.
Les activités taurines festives traditionnelles
Les fêtes de village du midi de la France, essentiellement dans les départements du Gard et de l’Hérault, sont marquées par des rituels taurins issus d’anciennes techniques d’élevage. Il s’agit notamment de l’abrivado et de la bandido.
L'abrivado est un mot provençal « abrive » signifiant « élan, hâte », désignant jadis la conduite des taureaux depuis les pâturages jusqu'aux arènes sous l’escorte des gardians. Le trajet inverse est appelé bandido.
Ces défilés taurins se pratiquent dans les rues des villages, sécurisées pour l’occasion, sous l’acclamation des villageois qui s’empressent pour les plus alertes de suivre le cortège des taureaux encadrés par les manadiers à cheval.
La course camarguaise
La course camarguaise trouve ses origines dans l’exercice auquel se livrait l’homme pour arriver à dompter l’animal pour les travaux agricoles. Le face à face entre l’homme et l’animal s’est progressivement organisé dans les cours des mas, devenant ainsi une activité distractive dominicale très prisée. Il s’agissait déjà d’attraper des mouchoirs placés entre les deux cornes du taureau. Toutefois, ces courses étaient mal tolérées par les autorités publiques jusque dans les années 1850. Jugées anarchisantes et dangereuses, elles étaient même interdites.
Elles furent à nouveau autorisées sous le règne de Napoléon III, sous l’influence de son épouse, l’Impératrice Eugénie de Montijo, d’origine espagnole, qui favorisa l’entrée de la tauromachie espagnole en France par la corrida. L’essor des spectacles tauromachiques légalisa donc les courses de taureaux et notamment la course camarguaise qui se professionnalisera peu à peu avec des raseteurs de métier.
La course camarguaise est un sport dans lequel les raseteurs tentent d'attraper des attributs primés fixés au frontal et aux cornes du cocardier (taureau). Pratiqué dans les départements du Gard, de l'Hérault, une large partie des Bouches-du-Rhône ainsi que dans quelques communes du Vaucluse, la compétition s’organise en trois trophées : le Trophée des As, le Trophée des Raseteurs et le Trophée de l'Avenir.
Nîmes et sa féria, haut lieu de la tauromachie
La tradition de la corrida à Nîmes est ancienne puisque des corridas étaient déjà organisées dès la deuxième moitié du XIXème siècle. Le taureau de corrida n’est toutefois pas issu de la race camarguaise. Il s’agit d’une race bovine espagnole spécialement élevée pour les spectacles de tauromachie. Le poids moyen du taureau de corrida est de 500 kilogrammes contre 400 kilogrammes au maximum pour le taureau camarguais favorisant ainsi son aptitude à la course.
La fondation de l’Union taurine nîmoise, plus ancien club taurin de France, date de 1896. De nombreuses associations taurines ont par la suite été créées à Nîmes.
La feria de Nîmes telle que nous la connaissons aujourd’hui existe depuis 1952 à l’initiative de cinq clubs taurins. Dès lors, la feria de Pentecôte a connu un succès grandissant et reste la grande fête populaire annuelle de la cité nîmoise, interrompue une seule fois depuis sa création à l’occasion des événements de mai 1968. Chaque année, la feria rassemble près d'un million de personnes du jeudi au lundi de Pentecôte. La Pégoulade ouvre les festivités le jeudi soir par un grand défilé populaire de chars lumineux qui parcourent la ville jusqu’aux Arènes. Pendant cinq jours, les Nîmois vivent au son des fanfares et au rythme des bodégas, des animations de rues (courses de taureaux) et des corridas qui rassemblent chaque soir les meilleurs toréadors du monde dans les arènes romaines, vieilles de presque 2 000 ans.
Depuis 1978, la feria des vendanges beaucoup plus intimiste, se tient le troisième week-end de septembre.
Toutefois, de nombreuses voix s’élevaient déjà au début du XXème siècle contre les souffrances infligées aux taureaux lors des corridas à travers des associations militantes œuvrant pour l’abolition des corridas. Ce mouvement se poursuit aujourd’hui avec de nombreuses actions menées sur le terrain par des militants engagés.