L’Empire colonial français
L’empire colonial français comprend l'ensemble des colonies, protectorats, territoires sous mandat ou sous tutelle gouvernés ou administrés par la France.
Commencée dès le XVIe siècle, la colonisation française s’accélère surtout par l’action de Colbert, ministre de Louis XIV qui cible en priorité l’Amérique (Canada, Louisiane, Antilles).
La colonisation a évolué selon les époques en fonction de son mode de gestion.
Des colonies antillaises esclavagistes des XVIIe et XVIIIe siècles à l'Algérie française, partie intégrante de la France, en passant par les protectorats de Tunisie et du Maroc, les superficies possédées ainsi que le nombre d’habitants ont fluctué au cours des siècles.
La colonisation s’est faîte en deux temps bien distincts, séparés par la Révolution et l’Empire napoléonien qui ont mis fin au premier empire colonial français.
Constitué à partir du XVIe siècle, il comprenait des territoires nord-américains, quelques îles antillaises ainsi que des établissements en Inde et en Afrique. Il s’étendait sur 10 000 000 km² jusqu’à la guerre de Sept Ans qui entraîna la perte d'une grande partie des territoires coloniaux de la France au profit de la Grande-Bretagne.
L'empire colonial français va perdurer toutefois et prospérer grâce aux exportations antillaises (Saint-Domingue, Martinique, Guadeloupe). Exportations de café notamment mais surtout de sucre entre 1763 et la fin des années 1780.
La vente de la Louisiane en 1803 par Napoléon Bonaparte signe la chute du premier empire colonial français.
Le second empire colonial, constitué à partir des années 1830, est composé principalement de régions d'Afrique acquises à partir d’anciens comptoirs, mais aussi d'Asie (Indochine) et d'Océanie (Polynésie française, Nouvelle-Calédonie notamment).
Ce second empire colonial est, au cours de la seconde moitié du XIXe et au début du XXe siècle, le deuxième plus vaste au monde derrière l'empire colonial britannique. La France possède en effet des colonies sur tous les continents pour une superficie totale de 12 347 000 km² entre 1919 et 1939 regroupant alors près de 68 690 000 habitants.
Un ministère des Colonies est même créé en 1894 tandis que les pavillons coloniaux se multiplient lors des grandes expositions universelles, notamment celle de 1900, propageant du monde colonial une image d’exotisme mais aussi de paternalisme et surtout de racisme.
Les visiteurs ont ainsi le « privilège » de visiter un village indigène reconstitué à Paris, censé démontrer la supériorité de la « civilisation française ». En 1906, Marseille organise par ailleurs une exposition exclusivement consacrée aux colonies rassemblant plus de 1,8 million de visiteurs. L’année d’après, celle de Paris dépasse les 2 millions de visiteurs. Il y en aura d’autres à Marseille en 1922 et à Paris en 1931.
De ce vaste empire colonial, ne subsistent aujourd’hui que les territoires d’outre-mer, anciens DOM-TOM : une douzaine de territoires insulaires dans l'Atlantique, les Antilles, l'océan Indien, le Pacifique Sud, au large de l'Antarctique et enfin la Guyane pour une superficie émergée totale de 119 394 km², sans compter la terre Adélie.
Ces territoires permettent toutefois à la France de conserver la plus grande zone économique exclusive (ZEE) au monde, avec 11 691 000 km² d'océans, devant les États-Unis.
L'esclavage dans l'empire colonial français
Entre les premières colonies au XVIe siècle et le décret d'abolition de l'esclavage du 27 avril 1848, ce sont environ quatre millions d’esclaves qui ont vécu dans les territoires sous domination française.
Le développement des plantations entraîne l'essor de ports négriers tels Nantes et Bordeaux. Les échanges s'effectuent majoritairement avec les Antilles françaises. Cette traite atlantique, menée par les Européens et les Américains, entraîne, tous pays coloniaux confondus, la déportation de douze à treize millions de Noirs, notamment à la fin du XVIIe siècle.
Entre 1788 et 1790, les 780 000 esclaves présents dans les colonies françaises représentent près de 90 % de la population devant les colons, largement minoritaires mais tout-puissants. Les esclaves africains amenés de force dans les colonies françaises sont essentiellement originaires d'une région comprise entre le Sénégal et l'Angola. Ils sont principalement envoyés dans les Antilles françaises pour la culture des plantations (canne à sucre, café, coton, etc.) On parle de « commerce triangulaire ». Les marchands négriers partent acheter en Afrique des esclaves qu’ils échangent une fois arrivés aux Antilles contre du sucre, du café, du cacao ramenés ensuite en Europe.
La traversée de l’Atlantique depuis l’Afrique dure environ deux mois dans des conditions d’hygiène et de promiscuité épouvantables. Entassés et enchaînés à fond de cale les uns sur les autres, les esclaves sont peu et très mal nourris. Les épidémies (scorbut, dysenterie) déciment ces hommes et ces femmes. 10 à 20 % d’entre eux, parfois plus, meurent en effet au cours des traversées.
La France, avec ses 4 220 expéditions négrières du XVIIe au XIXe siècle, se classe au troisième rang derrière la Grande-Bretagne et le Portugal. La ville de Nantes organise à elle seule 1 744 expéditions soit 41,3 % du total français. Suivent trois autres villes, Bordeaux, La Rochelle et Le Havre qui totalisent à elles trois 33,5 % des expéditions négrières.
Une fois arrivés à destination, les esclaves sont triés et vendus à des maîtres qui les exploitent pour les travaux des champs et des plantations. Certains, souvent les femmes, deviennent domestiques pour les riches familles.
Colbert fait promulguer en 1685 le Code noir, qui définit le statut juridique des esclaves. Ce dernier, considéré comme un bien meuble, peut donc être vendu ou légué. En cas de fuite ou de désobéissance au maître, l’esclave est sévèrement puni (mutilation ou peine de mort). Il doit obtenir l’autorisation de son maître pour se marier. Ses enfants sont automatiquement esclaves à leur tour. Les conditions de travail sont très éprouvantes et ils sont plus ou moins bien traités selon les maîtres. La mortalité reste importante, près de 12% par an, avant la promulgation du Code noir.
L’abolition de l'esclavage dans les colonies françaises
L'esclavage est aboli une première fois en 1794, alors que l’on compte plus de 700 000 esclaves. Cette première abolition est peu suivie d’effet, d’autant qu’en mai 1802, Napoléon Bonaparte rétablit l'esclavage selon les dispositions antérieures à 1789, tandis qu’en métropole, des mesures discriminatoires sont prises à l'encontre des Noirs et des « gens de couleur ».
Ce n'est qu'en 1848 que la France abolit définitivement l’esclavage dans ses colonies, libérant ainsi près de 248 500 personnes, environ 87 000 en Guadeloupe, près de 74 450 en Martinique, plus de 62 000 à La Réunion, 12 500 en Guyane et plus de 10 000 au Sénégal.
Le processus de décolonisation après-guerre
L’empire colonial français, encore à son apogée à la fin des années 1930, est profondément remis en question à l’issue de la Seconde Guerre mondiale.
La conférence de Brazzaville, réunie par le général de Gaulle en 1944, amorce une prise de conscience des problèmes coloniaux et ouvre des perspectives de réformes. Ainsi, la IVe République adopte et met en place, en 1946, un nouveau cadre juridique destiné à se substituer à l'Empire français sous le nom d'Union française.
En réalité, il y a peu de changements et la métropole maintient pour l'essentiel sa tutelle sur ses colonies qui deviennent des « départements et territoires d'outre-mer » (DOM-TOM). L'Union française est dotée d'une assemblée purement consultative. La France refuse en effet de s'engager dans aucune des deux politiques encore possibles, l'assimilation impliquant l'égalité des droits ou l'acceptation d'un processus d'émancipation progressive débouchant à terme sur l'indépendance. La France sous-estime alors la puissante volonté d’émancipation des peuples indigènes qui gagne du terrain. En effet, sur tous les continents, le processus de décolonisation s’enclenche inéluctablement.
En Indochine d’abord, avec une guerre qui éclate en 1946 et qui se soldera en 1954 par la dissolution de cette colonie avec la sortie des pays la composant (Vietnam, Laos et Cambodge) ainsi que la division du Vietnam en deux états rivaux, qui débouchera sur la guerre du Vietnam quelques années plus tard. La guerre d’Indochine cause la perte de plus de 500.000 personnes.
En Afrique noire ensuite, avec la loi-cadre Defferre de 1956 accordant une assez large autonomie aux territoires africains, qui peuvent désormais élire chacun une assemblée locale appelée elle-même à désigner des représentants à un conseil de gouvernement dont le vice-président doit être obligatoirement africain.
Revenu au pouvoir en 1958, le général de Gaulle poursuit dans cette voie en appelant les territoires d'outre-mer à devenir membres d'une Communauté française qu’il préside, préparant le chemin vers l'indépendance.
En Afrique, seule la Guinée refuse et accède immédiatement à l'indépendance. Les autres territoires d'Afrique noire et Madagascar deviennent membres de la Communauté, avant d'accéder à leur tour à l'indépendance en 1960.
En Algérie enfin, avec la répression sanglante des émeutes de Sétif, humiliant le peuple algérien face au refus des réformes par les Français d’Algérie. Le statut de 1947 instaure une assemblée algérienne élue selon un mode de scrutin très inégalitaire (double collège), lésant la majorité musulmane et alimentant encore les tensions jusqu’à l’éclatement d’une insurrection armée, déclenchée à la Toussaint 1954 par le Front de libération nationale (FLN).
Revenu au pouvoir en mai 1958, grâce à la pression des militaires et des Français d'Algérie, de Gaulle laisse croire un temps qu'il va pacifier l'Algérie et la maintenir française. Mais face à la pression des membres du FLN, il fait entériner par référendum en 1961 une politique d'autodétermination qui admet la possibilité d'une « Algérie algérienne ». Après le putsch des généraux d'Alger de 1961, il engage avec le FLN des négociations qui aboutissent aux accords d'Évian signés en 1962. L'indépendance de l'Algérie est approuvée massivement par référendum. Les violences perpétrées par l'Organisation de l’armée secrète (OAS) anéantissent toutefois les chances de réconciliation entre les deux communautés condamnant ainsi près d'un million de Français, les pieds-noirs, à fuir précipitamment l'Algérie en laissant leurs biens pour gagner la métropole.
En Tunisie et au Maroc, les gouvernements français répriment d’abord les nationalismes naissants au début des années 50. Habib Bourguiba, chef tunisien, est emprisonné en France tandis que le roi du Maroc, Mohamed V, accusé de soutenir le parti indépendantiste, est exilé à Madagascar. Mais à partir de 1954, Mendès France engage les négociations puis accorde l'autonomie interne à la Tunisie. Après lui, Edgar Faure puis Guy Mollet poursuivent cette politique jusqu’à l'indépendance de la Tunisie et du Maroc en 1956.
L’héritage culturel de la colonisation
En 1962, l’empire colonial français est démantelé.
Ne subsistent que quelques territoires d’outre-mer situés en Amérique et dans les océans Indien et Pacifique où les revendications indépendantistes ressurgissent épisodiquement.
La France entretient toujours des relations avec ses anciennes colonies, notamment économiques et culturelles (sommets Afrique-France et de la Francophonie).
L’importance de la culture française est toujours considérable aujourd’hui.
Le terme francophonie est apparu pour la première fois vers 1880, lorsqu’un géographe français, Onésime Reclus, l’utilise pour désigner l’ensemble des personnes et des pays parlant le français. Dès les premières décennies du XXe siècle, des francophones prennent conscience de l’existence d’un espace linguistique partagé, propice aux échanges et à l’enrichissement mutuel. Ils se sont constitués depuis en une multitude d’associations et regroupements dans le but de faire vivre la francophonie au jour le jour. La communauté francophone représente près de 300 millions de personnes réparties dans le monde et avec l’essor démographique du continent africain, elle devrait atteindre plus de 750 millions de personnes en 2060.