Papa est au front

Le 11 novembre 2016, on célébrait le 98e anniversaire de l’armistice qui a mis fin à la Première Guerre mondiale.

C’est l’occasion pour les Archives départementales de mettre à l’honneur des témoignages d’enfants datant de novembre-décembre 1916. 

Après la période de guerre de mouvement de l’automne 1914, qui avait vu les Allemands s’approcher de Paris, puis le passage à la guerre de tranchées, marquée par l’épisode particulièrement meurtrier de Verdun à partir de février 1916, le conflit s’enlise, d’autant que les forces en présence (France, Angleterre et Russie d’un côté, Allemagne, Italie et Autriche-Hongrie de l’autre) ne semblent pas en mesure de faire la différence.

Les morts se comptent par milliers. Chaque famille est atteinte par le décès d’un père, d’un fils, d’un frère… La vie quotidienne des Français à l’arrière est aussi très dure, avec une économie qui fonctionne au ralenti, essentiellement orientée vers l’effort de guerre (armes, munitions…).

Le secteur agricole est atteint par le manque de main-d’œuvre et ne produit plus assez pour assurer le ravitaillement correct de l’armée et des populations. Les veuves et les orphelins subissent encore plus durement cette situation, malgré les aides apportées par l’État et les multiples œuvres caritatives. Parmi ces aides, figurent aussi celles envoyées par les Américains, qui n’entreront en guerre qu’au printemps 1917.

Valeurs patriotiques

Ainsi, lors du premier trimestre de l’année scolaire 1916-1917, l’inspection académique organise un concours dans les écoles primaires afin de demander aux enfants de rédiger des lettres ou des dessins de remerciements à leurs généreux donateurs américains.

Quelques-uns des devoirs réalisés par des élèves d’écoles gardoises ont été retrouvés dans les fonds versés par l’inspection académique, triés par les agents des Archives. Cet échantillon d’une vingtaine de pièces nous donne à voir des réalisations d’élèves allant de la maternelle (classes enfantines) aux écoles primaires supérieures (équivalent des classes de 6e et 5e actuelles).

Outre l’aspect visuel remarquable, il s’agit aussi d’un témoignage sur les valeurs et pensées de l’époque. On y trouve ainsi une exaltation des valeurs patriotiques, avec les drapeaux et les illustrations élaborés par les classes enfantines, le récit des souffrances vécues par les orphelins, le rappel des privations, des deuils exprimés dans un style très soigné… différent de celui des écoliers du XXIe siècle.

Cet élève de Canaules, âgé de huit ans, a rédigé une lettre de remerciements aux Américains, dans laquelle il rappelle que « sa maman est pauvre et se prive de tout pour son papa qui se bat depuis deux ans », et que « son vœu le plus cher est que les Boches soient battus ». On retrouve là encore un des leitmotivs de l’époque, avec le terme péjoratif de « Boches », diffusé par les poilus et repris par les populations civiles. Les dessins rappellent aussi l’importance accordée par les autorités aux liens entretenus avec les Américains.

Le dessin, représentant une petite fille en costume traditionnel d’Alsacienne, et réalisé par une élève de l’école primaire supérieure de Nîmes, âgée d’environ treize ans, rappelle l’une des motivations de la guerre : reprendre l’Alsace et la Lorraine, thème essentiel de la période.